Allier un dessinateur japonais et une peintre abstraite française dans une exposition qui vibre de couleurs, lumineuse et gaie, avec cette pointe douce-amère, le sentiment d’un paradis enfoui. Mais quel paradis ?
Véronique Lafont ne revendique pas l’étiquette de peintre abstrait. Elle s’inspire des visions de la campagne bourguignonne, de ces jardins touffus où la vie entremêle ses racines, ses branches, sa force et ses couleurs, les reflets du ciel en un ensemble d’une richesse folle, pour qui sait s’attarder.
Depuis près de 20 ans que je la connais, elle cherche à consoler les malvoyants que nous sommes souvent, par inconscience de l’importance du temps. Elle prend un détail et nous offre ses méditations colorées, nous rappelant que seule la concentration sans jugement, la plongée dans l’espace libre du temps présent, peut accueillir la joie.
La série présentée en février se nomme « Nuancier » : des états intérieurs flottants, profonds, apaisants et joyeux. Des fenêtres poétiques en petit format, aux noms choisis : « Rose suranné », « Bleu nordique ». Précieux. Et doux comme des textiles soyeux.
Makoto Muranaka est un dessinateur japonais explosif. Artiste aux multiples talents né à Tokyo, il s’adonna d’abord au rock dans un groupe, « Mamma Gil », qui signifie « la soupe de maman » en japonais. Puis devint acteur pour la télévision et le théâtre. En 2008, il émigre en France, et se lance en cuisine. Il est aujourd’hui chef dans un restaurant connu du 15ème arrondissement.
A la faveur de la crise covid, désœuvré, il abandonne le piano des cuisines pour prendre les crayons. Et croque avec frénésie un faux quotidien libéré de ses entraves. Mélange à la fois épicé et épuré de formes légères, de couleurs en ébullition et de créatures humaines ou animales croquées comme par effraction dans une attitude d’abandon ou de surprise… Il livre des instants sans pensée et sans paroles et partant, sans lourdeur. Son regard ne traduit pas une réalité, il propose son image mentale qui interprète une scénette et qui, surtout, laisse un vaste champ libre à l’imagination du regardeur. Makoto Muranaka revendique la liberté d’exploration du dessin, qui, comme la vie, est en constant mouvement. Son idéal serait de produire à chaque fois un dessin vraiment différent.
Son style convient si bien à nos contemporains, dont la vie et l’imaginaire sont des compositions éclectiques et parcellaires… Il souligne avec le sourire nos attitudes mi perdues mi bravaches. Son regard d’acteur est perçant. Se dégage une impression d’ensemble qui relie ces instantanés dans un roman graphique, un journal en images. Son obsession ? Dessiner avec véracité, mais surtout sans réalisme.
Véronique Lafont et Makoto Muranaka vont relier la nature, le ciel, et le monde humain et animal en un ensemble fantasque, lumineux, quelques bulles de gaieté en février, ce mois mal aimé : bienvenue dans cette percée colorée de l’écrin du Village Suisse.
Makoto Muranaka est né en 1974 à Tokyo. Il vit et travaille aujourd’hui à Paris. Remarqué au Japon, il est devenu en avril 2021 le collaborateur d’un web magazine connu, la Newsletter du Docteur Suidobashi. Il collabore également au web magazine Finders. Sa première exposition collective a eu lieu à Paris 11° à la Galerie Satellite, via l’association Modern Art Energy, qui valorise la scène japonaise en France. Une exposition de son travail est programmée en août 2022 à la Galerie Goto à Ginza, les « Champs Elysées » tokyoïtes. L’exposition à la Galerie Cécile Dufay est sa première exposition en duo.






Makoto Muranaka (@makoto913_) • Photos et vidéos Instagram
Véronique Lafont est née en 1969. Elle vit et peint en Bourgogne. Elle fut également sculptrice textile et publie régulièrement des livres d’art, en collaboration avec des auteurs et poètes, dont « Voleur de Feu, Méditations Pyrotechniques » sur un texte de Lionel-Edouard Martin, en 2019, et « Virée Slovaque » aux Editions Le Réalgar en 2020, avec le même auteur, qui vit et travaille en Martinique depuis une vingtaine d’années. Présentée par les galeries Amélie Maison d’Art et Garnier Delaporte, elle retrouve en entrant chez Galerie Cécile Dufay le chemin d’une collaboration ancienne entamée il y a 17 ans. Elle prépare également une exposition collective en Champagne à l’été 2022, sur l’actualité internationale de la peinture abstraite.
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